dimanche 28 septembre 2008

Du ciel du Luberon en Provence : Catastérisme, partie 2

Dans le Luberon les envies de beau et de vrai vous assaillent, partout une communion vous attend avec le ciel,soleil bleu,la nuit, noir d'étoiles, avec ses routes et chemins, à pied, à vélo. Aujourd'hui Les Correspondances à Manosque, les lettres, oui mais les rencontres, l'âme des hommes,une vie qui surgit.

Alors donc la suite de notre article sur les constellations, après avoir approché ce qu'est un mythe, voyons rapidement ce qu'est la mythologie Grecque ou du moins ce qui est utile d'en savoir pour notre propos.


(J.L. Dumoulin, 2007)

La mythologie Grecque

Les Sources

Bien qu’il ait quelques prédécesseurs Hésiode traite parmi les premiers de la mythologie en tant que telle. Hésiode, poète du huitième siècle avant Jésus Christ, a écrit « Théogonie » (De la Naissance des Dieux).
Sur le plan de l’astronomie et plus spécifiquement de la définition et de la dénomination des Constellations, trois noms en particulier sont à retenir,
Eudoxe de Cnide, il rédige au IVème siècle avant J.C. « Phénomènes », un ouvrage dans lequel il décrit les Constellations.
Aratos de Soles, au IVième avant J.C. avec son livre également appelé « Phénomènes », poème didactique indiquant les positions relatives des étoiles et des Constellations .
Enfin et surtout Eratosthène de Cyrène, IIIième siècle avant J.C., savant éclectique et rédacteur des « Catastérismes », description du ciel nocturne mêlant astronomie et mythologie. Directeur de la Grande Bibliothèque d’Alexandrie,
Eratosthène sera le premier à calculer la circonférence de la terre avec une précision surprenante.

Les Commencements suivant la mythologie Grecque d’Hésiode

…Au début était Chaos. Chaos est un principe, il signifie vide, sans limite et informe, sans commencement, ténébreux. Vide ne signifie pas sans potentialité ni virtualité… .
Puis apparut Gaia (ou Gaea) qui personnifie la Terre en devenir, elle émerge de Chaos. Peut-être dans notre langage moderne une de ses représentations serait-elle la matière mais une matière là encore dotée d’une certaine virtualité.

Alors vient Eros. Energie attractive qui engage les êtres, les plantes, les minéraux, et les choses à se joindre et à créer.
A eux trois ils constituent une trinité de forces surnaturelles, déités primitives aux contours mal définis.

Vide, matière, énergie, les acteurs sont en place, la création peut commencer.
Erebe et la Nuit sont issus de Chaos tout seul ainsi qu’Ouranos l’est de Gaia. D’autres viennent de l’union de frères et sœurs, phénomène qui s’avèrera fréquent dans la mythologie Grecque, ou de l’union entre mère et fils, par exemple Gaia et Ouranos.

Gaia avec Ouranos aurons la descendance suivante :
• Les 12 Titans pour certains personnifications d’éléments de la création en même temps que fils ou filles de Gaia et Ouranos dont :
• Cronos, père de Zeus, d’Héra, de Poséidon, …
• Japet, père de Prométhée, …
• Océanos, élément originel, personnification divine de l’eau, Il entoure la Terre tel un immense fleuve où tout se crée et où tout vient mourir.
• …
• Les 4 Cyclopes, géants avec un seul œil au milieu du Front
• Les 3 monstres aux cent bras et cinquante têtes appelés Hécatonchires.



Ouranos, le ciel étoilé, rejette violemment la progéniture de Gaia il craint qu’elle ne le sépare de son épouse-mère/la terre. Cette progéniture symbolise tout autant les forces aveugles de la nature, par exemple les cyclopes, génies de la foudre, qu’une nouvelle génération de Divinités qui tend à supplanter Ouranos.
Cronos, un des Titans va précipiter la séparation du ciel-Ouranos- et de la terre-Gaia- en mutilant atrocement Ouranos de ses parties génitales, première violence entre père et fils et entre frères. Mais violence tout à fait essentielle qui va dégager un espace vital pour la progéniture de Gaia, en particulier pour les Titans images encore lointaines des hommes. Elle va aussi permettre que la création se poursuive. Toutes sortes de forces-divinités, pour la plupart filles de Nuit, apparaissent qui seront les vecteurs des comportements et de la destinée des humains, la Fraude, la Discorde, la Vieillesse, la Peine, la Faim, le Meurtre, le Mensonge…comme s’engouffrant dans la séparation béante du ciel et de la terre.
Car déjà l’enchainement fatal des destins s’installe. Cronos craint de subir de sa propre progéniture ce qu’il a fait subir à son père. Pour la faire disparaître il avale tous les enfants qu’il a de Rhéa, sa sœur. Grace à un subterfuge Zeus échappera au sort qui lui est ainsi promis.

Effectivement, Zeus, Dieu de la troisième génération chasse du ciel Cronos, son père et le relègue enchainé aux derniers fondements de l’Univers, un châtiment somme toute déjà plus humain que celui subit par son « Grand-père », Ouranos.
Avec Zeus, la génération des Dieux Olympiens prend le pouvoir et met fin à l’ère des divinités primitives et à l’indifférenciation du ciel et de la terre. Cependant la majorité des Titans ne l’entend pas de cette oreille et craignant de perdre ses privilèges s’opposent à Zeus en une guerre qui dure 10 ans. Un véritable enfer s’ensuit, Zeus récupère les forces du tonnerre et de la foudre à son profit, l’incendie gagne jusqu’à Chaos ! Finalement vaincus avec l’aide des Cyclopes et des Hécatonchires, les Titans sont précipités au fond des abîmes « aussi loin de la surface de la terre que la terre l’est du ciel ».

Les Titans rebelles vaincus, Zeus doit alors affronter la révolte des Géants à jambes de serpent, fils de la dernière heure de Cronos. Un combat gigantesque se déroule autour de l’Olympe. Il s’agit pour ces forces obscures de reconquérir les Cieux. Aidé de ses enfants, Apollon, Héphaïstos, Arès, Athéna, Dionysos, d’Héra (son épouse officielle) et de Poséidon (fils de Cronos) Zeus résiste mais ne vaincra, paradoxalement, qu’avec l’aide d’un Humain, Héraclès
Les épreuves de Zeus ne s’arrêtent pas là. Un terrible monstre, Typhon, issu de Gaia, l’attaque, ultime tentative de la force sauvage représentation du mal pour combler à son profit
la séparation du Ciel et de la Terre. Tous les Dieux s’enfuient et Typhon capture Zeus qui ne doit son salut qu’à Hermès qui le délivre. Zeus parvient à faire fuir Typhon et à l’écraser sous l’Etna.
Zeus peut enfin instituer son ordre, un temps nouveau va advenir, celui des hommes séparés du ciel.
L’homme et la mythologie Grecque

En filigrane jusqu’à cet instant, l’homme commence à instiller l’histoire. Esquissé par les Titans, initié par Prométhée à l’aide d’eau et d’argile, l’homme ne prendra son essor qu’après le déluge. Auparavant il a connu l’âge d’or, sous Cronos, très proche des Dieux et donc du ciel, sa vie est une félicité complète. Puis à l’âge d’argent, l’homme devient faible et inepte, sa vie est brève, vide de sens. L’âge d’airain est celui d’un homme dur, impitoyable qui n’a de cesse de tuer son semblable. Quand à l’âge de fer, il marque l’aboutissement de la déchéance de l’homme avec le triomphe de la discorde, de l’injustice, de la fraude, du mensonge, du crime, de la misère. La dégradation de la condition humaine provient des conditions du partage résultant de la séparation du ciel et de la terre, des Dieux et des hommes. Les hommes ont voulu oublier les Dieux, prendre la meilleure part. Zeus s’est vengé des hommes, en leur enlevant le feu, puis en leur envoyant Pandore et son assortiment de maux en boîte, tous créés par Nuit, fille de Chaos .Enfin Zeus répand le déluge sensé anéantir l’humanité.

Inlassablement Prométhée, fils de Japet, par ses ruses soutient les hommes. Prévenant Deucalion et Pyrrha des intentions de Zeus, les deux derniers représentants de la race humaine survivent au déluge. Ils offrent un sacrifice à Zeus et repeuplent la terre en exécutant un oracle obtenu à Delphes. Se voilant le front, ils marchent dans la plaine jetant par-dessus leurs épaules des pierres arrachées à la terre. Celles lancées par Deucalion deviennent des hommes, celles lancées par Pyrrha deviennent des femmes.

Hommes et femmes naissent désormais de la terre, la séparation terre ciel est totalement consommée. Zeus déclare aux autres Dieux « non, quels que soient vos efforts, vous n’entrainerez pas du ciel sur la terre Zeus, la sagesse suprême », c’est du moins ce qu’Homère lui fait dire. Et Zeus délègue à des divinités secondaires, Illithie et Asclépios, le suivi des soucis des hommes. Illithie est préposée aux accouchements, fille d’Héra, certains disent qu’elle en est un double.
Asclépios, dieu de la Santé, apparaît en songe aux malades qui le consultent en son temple et leur prodigue des conseils. Issu de la lumière ou du feu il a la réputation de rendre aux malades la chaleur perdue.

Néanmoins Zeus s’adresse indirectement mais magistralement aux hommes par son ciel étoilé et les mythes éternels qu’il y inscrit. Les catastérismes rappellent aux hommes le temps merveilleux où ciel et terre communiquaient. Les catastérismes sont une réminiscence de l’âge d’or, Zeus (le plus souvent) fait monter au ciel, dans une sorte d’ascension grandiose, un mortel, des animaux ou des choses de la terre.
Ces catastérismes montrent qu’il est possible de dépasser la terrible rupture cosmologique intervenue à la suite de la chute de l’homme. Les constellations constituent ainsi les différents chapitres du plus beau des livres jamais écrits. L’encre animée des étoiles inscrit soir après soir les légendes exemplaires des héros et des choses. Au ciel le Héros, l’Animal ou les Choses catastérisés rejouent l’épisode qui leur a valu de devenir un modèle pour les hommes. Le ciel est ainsi non seulement un livre mais aussi un grand théâtre aux décors cosmiques. Chaque constellation y joue son rôle.
Et voici quelques aperçus de cette super-production.

De quelques constellations(la suite dans le prochain article)

mardi 23 septembre 2008

Du ciel du Luberon en Provence : Catastérisme, partie 1

Catastérisme, histoire mythique des constellations
J.L Dumoulin-2007

A Ansouis, en Luberon, le ciel est encore pur et sa voûte nocturne y est souvent sidérante, ceci donne le goût de découvrir les constellations et leurs noms.

Pas loin de 6000 étoiles sont visibles à l’œil nu, approximativement 3000 à partir de chacun des hémisphères.
Il paraît tout à fait impossible de se repérer dans une telle quantité d’astres. D’autant plus que la rotation de la terre sur elle-même et autour du soleil modifie l’emplacement apparent des étoiles (à l’exception de l’étoile Polaire). La position des étoiles les unes par rapport aux autres, par contre, ne change pas.
Ceci a conduit à l’invention capitale des Constellations.
Mais qu’est-ce qu’une constellation ?
C’est la réunion d’un certain nombre d’étoiles brillantes formant une figure reconnaissable dans le ciel nocturne.
En 1930 l’Union Astronomique Internationale a publié « La Délimitation Scientifique des Constellations ». Si pour le spécialiste cet ouvrage apporte des précisions essentielles, l’amateur se réjouira d’y retrouver des noms familiers, du moins en ce qui concerne l’hémisphère nord. Citons en quelques uns : constellation de la Grande Ourse, de la Petite Ourse,… constellation d’Andromède, d’Orion, de la Lyre, du Cygne, de l’Aigle, des Gémeaux, de la Vierge… .
Dans le ciel ces Constellations comme les étoiles ont des positions invariables les unes par rapport aux autres. A partir d’un lieu déterminé d’observation, certaines ne sont jamais visibles. D’autres sont observables quelque soit la période de l’année et l’heure de la nuit.
D’autres enfin ont un lever et un coucher avec des horaires variables suivant la saison.
Sur les 88 Constellations répertoriées, 45 peuvent être observées depuis la France.
En ce qui concerne l’hémisphère nord la presque-totalité des constellations a été inventée et baptisée par les Grecs de l’Antiquité.
La plupart de ces Constellations est associée à un mythe. Ce mythe comporte généralement une catastérisation c'est-à-dire le fait qu’un Dieu « place au ciel un être vivant, un objet, voire un fleuve ou un pays sous la forme d’un groupement d’étoiles ». Ce groupement d’étoiles est une constellation ou catastérisme..
Mais qu’entend-t-on par mythe ? Et que représente une catastérisation dans la mythologie Grecque ?


La notion de mythe

Avant d’aborder la mythologie grecque et pour disposer d’outils d’interprétation pouvant en rendre le sens, il est utile de se pencher sur la notion même de mythe.
La mythologie Grecque n’est qu’une des mythologies connues. Il existe aussi une mythologie Egyptienne, Babylonienne, Inuite, Yakoute, Huron ,Navajo,Aztèque, Maya, Celte, Viking et encore beaucoup d’autres…Toutes ces mythologies présentent des points communs qui peuvent aider à cerner en quoi consiste un mythe.
Le mythe est une histoire tenue pour vraie qui s’est passée au tout début des temps. En la racontant on rejoint magiquement le temps de la création.
La perfection se trouve aux origines, d’où l’importance donnée à la remémoration des événements mythiques. Pour les Dieux le vrai péché des hommes, c’est l’oubli des premiers temps. Celui qui sait, c’est celui qui se rappelle les Commencements. Les mythes sont faits pour être retenus et redits.
Le mythe atteste que quelque chose existe bel et bien, une chose, un animal, un événement, les saisons… un astre, une constellation, le monde… dont les manifestations sont consistantes et durables. En ce sens le mythe fonde et en même temps explique. Le monde n’est pas illusoire et ses manifestations ne sont pas transitoires. Les mythes parlent du pourquoi en disant le comment .Ce faisant ils pérennisent le monde aux yeux d’hommes éprouvant avec acuité la précarité de leur existence et lui donne un sens.
Dans le mythe il y a donc dévoilement du mystère de ce qui est.
Les mythes expliquent comment l’homme par sa faute a perdu ses conditions de vie primitives paradisiaques et son immortalité. Ce sentiment d’une faute impardonnable ou, tout du moins d’une grave légèreté de l’homme à l’égard de son immortalité imprime à toute sa vie son côté dramatique. Il trouble sa conscience en nourrissant ses angoisses. Pour retrouver la condition paradisiaque primitive, l’homme devra surmonter les épreuves dressées sur sa route. Chacune le purifiera.
Pour les anciens peuples, le ciel est longtemps resté une réalité accessible à l’homme. Ce qui s’y passe, ce qui s’y crée, ce qui y meurt fait partie de l’histoire des dieux et de la sienne propre.
Au temps paradisiaque, les dieux descendent sur la terre et se mêlent aux humains, de leur côté les hommes peuvent monter au Ciel en escaladant une montagne, un arbre…une liane…une échelle ou portés par des oiseaux ; les hommes sont immortels, libres, spontanés, amis des animaux…
L’apparition et/ ou la chute de l’homme s’accompagne d’une rupture cosmologique qui explique pourquoi le ciel s’est éloigné de la terre. Ceci implique que le mythe indique comment il se fait que le ciel ne tombe pas sur la tête des hommes.

Dans les mythes le sacrifice reste l’acte essentiel par lequel se forgent et s’échangent les forces de l’univers, il est un acte créateur sans lequel rien ne pourrait exister.
Le mythe montre des comportements exemplaires fondés par les Dieux ou les Héros civilisateurs qui sont des modèles pour les humains. Le mythe existe pour que ces modèles ne soient pas oubliés.
L’homme « ancien» n’a pas vraiment le sens du divin, ignorant des lois de la nature, il attribue tous les phénomènes, aussi bien normaux qu’exceptionnels, à des forces surnaturelles
des Esprits…qu’il convient de se concilier.
Les mythes sont souvent des « retranscriptions » qui recèlent la mémoire lointaine d’un ancien rituel, d’un esprit primitif de la nature, d’un animal totem, plus tardivement d’un fait historique important, d’une guerre, d’une légende magnifiant l’origine d’une ville ou d’une famille…
Dans le cas de la mythologie Grecque, les poètes, Homère, Epiménide…, les dramaturges, Eschyle, Sophocle… et les astronomes se sont nourris de ces « retranscriptions » et ont créé un ensemble de mythes élaborés.
La mythologie Grecque abonde en métamorphoses. A travers les métamorphoses il y a révélation de ressemblances qui établissent une parenté entre tous les éléments de l’univers et de la possibilité de les transformer, ou qu’ils se transforment, les uns dans les autres.
Ceci s’applique aussi au moi de l’individu et à son identité qui sont multiples et donc incertains d’où l’abondance de noms pour le même personnage mythique.






La mythologie Grecque...(sera publié dans le prochain message)

jeudi 18 septembre 2008

Galilée, le géocentrisme, l'héliocentrisme, l'Eglise et la Bible

J'ai recu le message suivant de Joël Col :

Condamnation de Galilée.

La grande question qui se posait à l’époque de Galilée était : “Quel astre tourne autour de l’autre ? Le soleil autour de la terre ou la terre autour du soleil” ?
En affirmant la rotation de la terre autour du soleil, Galilée se trouvait en contradiction avec les scientifiques, les philosophes, l’Église et la Bible qui, tous, soutenaient la thèse contraire.
Or, dans mon étude “Entre Galilée et l’Eglise : la Bible”, je démontre que Galilée était en accord avec les Textes originaux hébreux et grecs, mais en désaccord avec leurs traductions. En d’autres termes, si les versions de la Bible avaient été fidèles aux Textes originaux, Galilée n’aurait pas été condamné pour avoir “tenu et cru une doctrine fausse et contraire aux saintes Écritures”.
Par cette étude, j’œuvre pour obtenir la réhabilitation officielle de Galilée et la mise en conformité des traductions de la Bible avec leurs Textes originaux qui, en aucun cas, ne peuvent être tenus responsables de la condamnation du savant.

Pour plus d’informations consulter :
http://monsite.orange.fr/erreur.verite
http://monsite.orange.fr/autoedition.meguila

Voici quelle a été ma réponse

Cher Monsieur Col,

Merci de votre message, je vais lire votre ouvrage avec grand intérêt, hélas, bien que résidant habituellement dans le Luberon je ne pourrai pas assister à votre conférence à Marseille ou Aix. Peut-être la ferez-vous à Paris où je resterai les 5 prochains mois, Sorbonne oblige.

Votre démarche m'inspire quelques réflexions que je vous livre telles quelles :

Qu'est-ce qui pouvait conduire l'Eglise Catholique du 17ième siècle à défendre le géocentrisme plutôt que l'héliocentrisme ?
Peut-être faut-il rappeler que Copernic aussi bien que Galilée ont été encouragés dans leurs recherches par certains princes de l'Eglise. L'ouvrage de Copernic a pu être publié parce que contraint ou forcé celui-ci a présenté l'héliocentrisme comme une hypothèse. Lui-même Copernic craignait que cette "nouvelle théorie" sème la discorde. C'est que nous sommes en pleine contestation de l'Eglise par la Réforme. Au delà de la science, les papes pensent à consolider l'édifice et non à ouvrir une nouvelle brèche ou ce qui pourrait apparaître comme telle. Souvenons-nous que la Réforme prône un retour stricte aux textes bibliques (même mal traduits !)
Après tout, les fidèles sont naturellement, spontanément géocentristes, c'est l'expérience, la perception commune, le soleil tourne autour de la terre, la terre est immobile. N'allons pas ouvrir un nouveau front de perturbation qui pourrait servir la Réforme.
N'oublions pas non plus que Galilée n'avait ni la retenue ni la discrétion de Copernic ou, plus tard, de Newton. Il voulait promouvoir l'héliocentrisme haut et fort et pensait que c'était l'intérêt de l'Eglise.

Par delà la situation tactique de l'Eglise devant la Réforme, il y a le fait que l'Eglise a sans doute hésité à faire descendre l'Homme du piedestal que constituait le géocentrisme :
la terre au centre de l'univers et l'Homme dessus, étage ultime, couronnement de la Création. Rien de tel pour ancrer la vision d'un Dieu personnel et d'un Homme créé à l'image de Dieu, rien de tel pour donner confiance et vigueur à un Homme encore confronté aux rigueurs et aléas d'une nature qu'il était encore assez loin de maîtriser.
Peut-être faut-il aussi y voir une tentative pour sauvegarder l'image d'une symétrie entre le tryptique hiérarchique Dieu- la terre- l'univers et le tryptique tout aussi hiérarchique Dieu-l'église-les fidèles.
Par une sorte d'ironie du sort, du moins à l'égard des ultra positivistes, l'héliocentrisme puis le "galactisme" assorti de son "big bang" ont fini par faire ressurgir l'idée de création et surtout le possible principe anthropique lequel remet l'Homme au centre du jeu, en tant que finalité de la création !

Je ne peux, cher Joël Col, qu'acquiescer à votre démarche de vérité et essayer de la faire partager.

Cordialement

Jean-Louis Dumoulin
Ansouis le 18/09/08

mercredi 17 septembre 2008

Au sujet de la connaissance scientifique

Réflexions sur la théorie des postulats de Robert Heickes par J.L. Dumoulin

Nous avons eu avec Robert Heikes un échange approfondi dont une partie a été publié sur ce blog le 31 août dernier.
Les présentes réflexions s’appliquent à cet entretien.



Robert nous dit que le postulat d'Euclide, celui sur les parallèles à une droite par un point serait en quelque sorte le premier postulat… pourquoi pas ?

Mais est-ce que c'était un « postulat » pour Euclide lui-même, au sens moderne du terme, au sens que lui donne Robert ?
N'est-il pas devenu un postulat qu'après coup, particulièrement lorsque l'idée de la géométrie non Euclidienne est apparue ?
Qu'est-ce que c'était « avant », pour son inventeur et pour ceux, nombreux, qui ont appris cet axiome ?

En fait le « postulat » d'Euclide » est retenu par Robert comme fondant une géométrie de l'espace physique sensible, il décrit « la physique », l'espace dans la nature terrestre.
Y avait il un « postulat » préexistant à celui d'Euclide puisque Robert nous dit que les postulats sont très souvent la généralisation de postulats antérieurs ?

Et s’il y avait « nécessairement » un ou des postulats préalables à celui d'Euclide, quels seraient-ils ?
Est-ce que ça serait :
 L'espace est une réalité générale qui partout a les mêmes propriétés, à Alexandrie, à Athènes mais aussi en Macédoine et même chez les barbares ?
Ou encore
 Les parties d'espace peuvent être définies par des lignes, ces lignes forment des figures, ces lignes entre elles et ces figures ont certaines propriétés que l'on peut saisir en esprit par le raisonnement ?
Ou encore
 Il y a moyen de présenter et énoncer les propriétés des figures d'une façon sensible et compréhensible ?

Et en remontant encore plus loin, pourrait-on trouver des postulats « ancêtres » de ces 3 dernières propositions de « postulats pré-Euclidiens » fictives ?
Quels seraient-ils?
Je ne vois que des mythes cosmogoniques et de création qui puissent jouer ce rôle du fait même qu'ils attestent bien qu'une réalité extérieure existe et qu'elle a une consistance pérenne. Le monde n’est pas un rêve. Le monde a été créé au titre d’événements dont la tournure a un sens. L’homme a son propre mode d’être au monde qui marque son appartenance à celui-ci mais l’en distingue également.

Ainsi cette généalogie de postulats qui raconte la science pourrait remonter aux mythes des temps reculés de l’humanité…

Robert paraît suggérer que les postulats arrivent naturellement …. L’idée pourrait alors venir que la science soit donc une sorte de machine :
On produit des postulats en très grande quantité, on regarde quelles implications ils peuvent avoir, on vérifie la réalité de ces implications et on qualifie les postulats dont les « prévisions » se » révèlent exactes. Cette version de la génération de la science prête instantanément à rire. Rien de tel ne correspond à la réalité ou au vécu du cheminement de la science. D’une part comme cela a été noté à maintes reprises par différents auteurs la découverte scientifique ne peut être détachée de son cheminement historique:
« Le deuxième principe qui devrait guider une épistémologie défendable (…..), c’est qu’elle n’est jamais séparable de l’Histoire des sciences » (Hervé Barreau- L’Epistémologie- PUF)
ou comme le souligne Gaston Bachelard :
« … un objet scientifique n’est instructeur qu’à l’égard d’une construction préliminaire à rectifier, d’une construction à consolider….
Le rationalisme est une philosophie qui continue ; il n’est jamais vraiment une philosophie qui commence. »

D’autre part les postulats contiennent une variété d’éléments nouveaux divers originaux, rien qui puisse suggérer la moindre standardisation, la moindre répétition. Cela peut être une notion ou une relation ou même l’existence d’une substance (par exemple la « matière noire »)…Le postulat n’est donc pas une simple hypothèse « directe » et n’a rien à voir avec le fait d’ « avoir une idée ». Par exemple pour énoncer son postulat de la force gravitationnelle, Newton a inventé le calcul différentiel.
Certains postulats supposent une vision de quelque chose, cette vision même si elle survient par le plus grand des hasards n’est pas le fruit du hasard, Poincaré écrivant des équations sur la capote d’un fiacre est une anecdote amusante mais il s’agissait de Poincaré et non pas du cocher du fiacre. C’est peut-être une possible illustration de ce que Bachelard écrivait au sujet des idées scientifiques :
« Tant qu’on a pas réalisé le double ancrage dans le monde du sujet et dans le monde de l’objet, la pensée n’a pas trouvé les racines de l’efficacité ».
Oui pensée, intellection, esprit….le tout dans le postulat de quelque chose par quelqu’un à un moment donné.
Robert insiste sur le fait que la valeur du postulat, c’est sa vérification au niveau de la réalité des phénomènes qui en seraient la conséquence. Pratiquement le postulat ne vaut que par sa vérification et d’ailleurs Robert généralise, toute idée, concept, notion…croyance ne valent que par la preuve de leur manifestation.
L’histoire montre que concevoir l’expérience de vérification n’est souvent pas une mince affaire et s’est parfois avéré être une affaire de génie avec mille péripéties. Mais Robert ne nous en parle pas, ceci rehausserait pourtant sa thèse qui est celle du primat de la vérification. Non il préfère nous rappeler la lignée des postulats, de leurs auteurs et de leurs dates. Nous le comprenons car une fois vérifié ce qui compte c’est le contenu du postulat, c’est par lui que nous apprenons quelque chose. Le postulat contient les intuitions, les visions et pour tout dire les intellections de son inventeur et nous ouvre l’esprit sur des matières, des notions, des relations inédites à leur époque.
Certes dans la physique moderne le contenu paraît si loin de toute interprétation sensible que seuls demeurent, pour le moment, des postulats désincarnés que seule la vérification pourra attester, c’est sans doute ce qui faisait dire à Gaston Bachelard :
« Le monde est alors moins notre représentation que notre vérification ».
Se satisfaire de cette connaissance indirecte serait aller vers l’assèchement de l’imagination et même de l’imaginaire, car finalement ce qui marche ou qui réussit serait reconnu comme seul réel or l’homme a besoin pour comprendre d’un réel dans son tout. Hervé Barreau l’a compris depuis longtemps :
« Mais l’idée d’un univers qui n’aurait aucun lien avec les moyens que nous possédons de l’identifier n’est qu’une pseudo- idée, un mythe plus inconsistant encore que les mythes d’autrefois. »
Un grand mathématicien, Von Neuman, je crois, a déclaré que l’on ne comprenait pas les innovations en mathématiques, on s’y habituait. De la même façon que l’on s’habitue à quelqu’un….Par ailleurs peut-être faut-il s’habituer à quelqu’un pour le comprendre.
Nous avons aimé la physique classique si habituelle et que nous comprenons si bien. Nous aimerons cette physique moderne à condition de puiser sans réserve dans les mythes qui sont constitutifs de notre existence cosmique. Nous avons bon espoir sur ce sujet car nous sommes persuadés que « certains aspects et fonctions de la pensée mythique sont constitutifs de l’être humain ».J.L. Dumoulin